samedi 7 septembre 2013

(Si) la cosmologie quantique rentre dans l'ère de la précision (l'âge de raison?), (est-ce) un moment d(e dés)illusion pour la physique des (astro)particules ?

Rubrique Dévissage(s) (2)

Ne pas confondre accélération et inflation (de l'expansion de l'univers ou du développement des théories cosmologiques ;-) 
It was discovered in 1980 that the quantum fluctuations of the metric can explain the observable structure of the universe if and only if the expanding universe went through a stage of cosmic acceleration [1]. The spectrum of these perturbations in the range of observable scales was calculated for the first time in [2]. About the same time it was realized that in order to understand the large scale homogeneity and isotropy of the observable universe one also needs a stage of accelerated expansion, cosmic inflation [3]. At present there exist hundreds of different inflationary scenarios. 
En 1980 on a découvert que les fluctuations quantiques de la métrique peuvent expliquer la structure de l'univers observable si et seulement si l'univers en expansion est passé par une phase d'accélération cosmique [1]. Le spectre de ces perturbations dans la gamme des échelles observables a été calculé pour la première fois dans [2]. Vers la même époque, on a pris conscience que pour comprendre l'homogénéité à grande échelle et l'isotropie de l'univers observable une phase d'expansion accélérée appelée inflation cosmique [3] était nécessaire. À l'heure actuelle, il existe des centaines de  scénarios inflationnistes distincts.
Viatcheslav Mukhanov, Quantum Cosmological Perturbations: Predictions and Observations, 13/03/13

Soumettre à l'épreuve des faits expérimentaux des modèles prédictifs est un art qui se nourrit du maximum de contraintes portées sur le minimum de paramètres (et non l'inverse).  
To understand what theory of quantum fluctuations really predicts and how to extract the parameters, characterizing the inflationary stage, from observations it is convenient to describe inflation using the effective hydrodynamical approach. In this approach the state of the matter is entirely characterized by its energy density ε and the pressure p. In this note I will only consider the predictive inflationary theory, when both the acceleration and the perturbations are due to the same matter component. There exist many models where one kind of matter is responsible for acceleration and the other for perturbations. In these models nearly any outcome of the measurements can be accommodated making them experimentally non falsifiable and therefore of no great interest. Indeed a theory makes sense only if it makes non-trivial predictions which can be confirmed or disproved by measurements and the best theory is the theory with the minimal number of parameters. In fact, there is no need to involve more parameters unless there appears an obvious contradiction with experimental data or there exist deep theoretical reasons for doing so. Because the theory of simple inflation is in excellent agreement with the present observations it is enough to restrict ourselves to this predictive theory. 
Pour comprendre ce que la théorie des fluctuations quantiques prédit vraiment et savoir comment extraire les paramètres caractérisant la phase inflationniste à partir des observations il est commode de décrire l'inflation en utilisant une approche effective de type hydrodynamique. Dans cette approche, l'état ​​de la matière est entièrement caractérisé par sa  densité d'énergie ε et la pression p. Dans cette note,  je vais seulement considérer la théorie inflationniste prédictive dans laquelle l'accélération et les perturbations sont dues à la même composante de matière. Il existe de nombreux modèles où un type particulier de matière est responsable de l'accélération et un autre des perturbations . Dans ces modèles on peut rendre compte de presque tous les résultats de mesures ce qui les rend expérimentalement non falsifiables et donc sans grand intérêt. En effet, une théorie n'a de sens que si elle fait des prédictions non triviales qui peuvent être confirmées ou réfutées par des mesures et la meilleure théorie est celle avec le nombre minimal de paramètres. En fait, il n'est pas nécessaire de prendre en compte davantage de paramètres à moins qu'il n'apparaisse une contradiction flagrante avec les données expérimentales ou bien qu'il n'existe des raisons théoriques profondes pour le faire. Puisque la théorie de l'inflation simple est en excellent accord avec les observations actuelles il est suffisant de nous limiter à cette théorie prédictive .
Viatcheslav Mukhanov, ibid. 

De la robustesse des prédictions de la théorie des perturbations cosmologiques quantiques (ou ces sacrés théoriciens russes et leurs merveilleuses solutions analytiques). 
The key point is that the microscopic origin of the dark energy does not play a crucial role regarding the major predictions of the quantum cosmological perturbations theory. Everything we need is a “decaying cosmological constant”... The logarithmic spectrum obtained in [2] ... is in good agreement with the most recent measurements of the CMB fluctuations [5] ... and confirm the logarithmic dependence of the gravitational potential at the level of 3,5σ. This logarithmic dependence has a deep physical origin since it is due to the small deviation of the equation of state from cosmological constant needed for a graceful exit. 
...I would like to stress that the model independent predictions above are extremely nontrivial and were for a long time in conflict with observations. For example, in the 80th, along with the theory of quantum initial perturbations there were competing theories of cosmic strings, textures and entropy perturbations, which sometimes were even more favorable from the point of view of observations. However, now all these theories are ruled out and only the theory of quantum cosmological perturbations with all its nontrivial predictions is confirmed by observations.  
Le point clé est que l'origine microscopique de l'énergie sombre ne joue pas un rôle crucial en ce qui concerne les principales prédictions de la théorie quantique des perturbations cosmologiques . Tout ce dont nous avons besoin est une " constante cosmologique décroissante " ... Le spectre logarithmique obtenues dans [2] ... est en bon accord avec les mesures les plus récentes des fluctuations du fond diffus cosmologique [5]... et confirment la dépendance logarithmique du potentiel gravitationnel à un niveau de confiance de 3,5 σ. Cette dépendance logarithmique a une origine physique profonde car elle est due à la petite déviation de l'équation d'état par rapport à la constante cosmologique requise pour une sortie douce de la phase inflationnaire.
... Je tiens à souligner que les prédictions ci-dessus, qui ne dépendent pas du modèle, n'ont absolument rien d'évident et furent longtemps en conflit avec les observations. Dans les années 80 par exemple il y a eu, parallèlement à la théorie quantique des perturbations initiales, des théories concurrentes comme celles des cordes cosmiques, des textures et des perturbations entropiques qui ont parfois été plus en accord avec les observations de l'époque. Cependant toutes ces théories sont maintenant réfutées et la théorie des perturbations cosmologiques quantiques avec toutes ses prédictions non triviales sont confirmées par les observations. 
Viatcheslav Mukhanov, ibid.

Peut-on être déjà sûr de l'origine quantique des premières structures de l'Univers sans avoir encore détectée l'une de ses signatures gravitationnelles dans le modèle (le plus) simple d'inflation cosmologique?
One more robust prediction of inflation is the existence of the longwave gravitational waves [6]... Although primordial gravitational waves are not yet detected, the experimental confirmation of the flatness of the universe, adiabatic nature of nearly gaussian perturbations and the discovered (at 3,5 sigma level) logarithmic tilt of the spectrum unambiguously prove the quantum origin of the universe structure and the early cosmic acceleration ... Given that the quantum origin of the universe structure is experimentally confirmed, the precision measurements already now allow us to exclude many inflationary scenarios existing in the literature. Moreover, the improved accuracy of the determination of spectral index, the bound (or detection) on non-gaussianity and the bound (or possible future detection) on primordial gravitational waves will allow us to put further restrictions on the admissible inflationary scenarios. 
Une prédiction plus robuste du scénario inflationnaire est l'existence d'ondes gravitationnelles de grande longueur d'onde [ 6 ] ... Bien que les ondes gravitationnelles primordiales n'aient pas encore été détectés, la confirmation expérimentale de la  quasi -platitude de l'univers, la nature adiabatique des perturbations presque gaussiennes et la découverte de l'inclinaison logarithmique (à un niveau de confiance de 3,5 sigma) du spectre prouve sans ambiguïté l'origine quantique de la structure de l'univers et la phase initiale d'accélération cosmique .... Étant donné que l'origine quantique de la structure de l'univers est confirmée expérimentalement , les mesures de précision nous permettent d'ores et déjà d'exclure de nombreux scénarios inflationnistes existants dans la littérature. En outre, l'amélioration de la précision de la détermination de l'indice spectral, la majoration (ou la détection) du caractère non-gaussien des fluctuations du fond diffus cosmoloigique et la borne sur (ou la détection éventuelle future de) l'amplitude des ondes gravitationnelles primordiales va nous permettre de mettre des contraintes supplémentaires sur les scénarios inflationnistes admissibles.
Viatcheslav Mukhanov, ibid.

Faut-il espérer percer les mystères quantiques actuels de la physique des particules en dévissant les rouages du mécanisme de formation des structures cosmologiques primordiales?
After the origin of the universe structure from quantum fluctuations is confirmed one can ask the question how much can we really learn about fundamental physics making precise measurements of the parameters α and β... Assuming that inflation is due to the slow roll scalar field with a standard kinetic energy term we will determine the scalar field potentials, which correspond to different values of α and β...although non-decisive for selecting a particular scenario the precision measurements are very useful for excluding the whole families of inflationary scenarios. It seems that taking into account the possible accuracy of the measurements, the uncertainty in N due to unknown detailed physics after inflation and the remaining freedom in the choice of β one will never be able to distinguish the models described by potentials of type ...
... this seems will not help us too much in recovering the fundamental particle physics behind inflation. In fact, the observational data only allow us to measure only the effective equation of state and the rate of its change in a rather small interval of scales. Keeping in mind unavoidable experimental uncertainty, the effect of unknown physics right after inflation and degeneracy in the scenarios discussed above we perhaps will never be able to find out the microscopical theory of inflation without further very essential input from the particle physics... 
the remarkable property of the theory of quantum origin of the universe structure is that the gravity seems does not care too much about microscopic theory providing needed equation of state, and allows us to make experimentally verifiable predictions. 
Après la confirmation de l'explication de l'origine de la structure de l'univers par des fluctuations quantiques, on peut se demander si effectuer des mesures précises des paramètres α et β permet d'en apprendre beaucoup sur la physique fondamentale ... En supposant que l'inflation est due au champ scalaire en roulement lent avec un terme d'énergie cinétique standard, nous allons déterminer les potentiels du champ scalaire qui correspondent à différentes valeurs de α et β ... quoique non déterminantes pour la sélection d'un scénario particulier les mesures de précision sont très utiles pour l'exclusion de familles entières de scénarios inflationnistes. Il semble qu'en tenant compte à la fois de la précision limité des mesures, de l'incertitude sur le paramètre N due aux détails inconnus de la physique après l'inflation sans oublier la liberté restant dans le choix de β on ne sera jamais en mesure de distinguer les modèles décrits par des potentiels de type ...
... il semble que cela ne nous aidera donc pas beaucoup à reconstruire la physique des particules fondamentales qui se cache derrière le phénomène inflationnaire. En fait les données observationnelles ne nous permettent de déterminer l'équation d'état effective et son taux de variation que dans un intervalle plutôt modeste de valeurs. Gardant à l'esprit les inévitables incertitudes expérimentales, les effets de la physique inconnue juste après l'inflation et le degré d'ambiguïté dans les scénarios décrits ci-dessus , nous ne seront peut-être jamais en mesure de trouver la théorie microscopique de l'inflation sans autre information substancielle issue de la physique des particules ...
... la propriété remarquable de la théorie de l'origine quantique de la structure de l'univers c'est que la gravité ne semble pas trop se soucier de la théorie microscopique responsable de l'équation d'état mais c'est pour cette même raison qu'elle nous permet de faire des prédictions testables expérimentalement.
Viatcheslav Mukhanov, ibid.

Les physiciens des particules savent dépasser leurs illusions passagères et continuer à espérer, la tête dans les étoiles...
The CMB spectrum measured by the Planck satellite points to a perfectly boring universe: the vanilla ΛCDM cosmological model, no hint of new light degrees of freedom beyond the standard model, no hint of larger-than-expected neutrino masses, etc. However at the quantitative level things are a bit more interesting, as Planck has considerably narrowed down the parameter space of inflation. 
... the current situation is interesting but unsettled. However, the limit r≲0.11 may not be the last word, if the Planck collaboration manages to fix their polarization data. The tensor fluctuations can be better probed via the B-mode of the CMB polarization spectrum, with the sensitivity of Planck often quoted around r∼0.05. If indeed the parameter ε is not much smaller than 0.01, as hinted by the spectral index, Planck may be able to pinpoint the B-mode and measure a non-zero tensor-to-scalar ratio. That would be a huge achievement because we would learn the absolute scale of inflation, and get a glimpse into fundamental physics at 10^16 GeV! Observing no signal and setting stronger limits would also be interesting, as it would completely exclude power-law potentials. We'll see in 1 year.  
Le spectre du fond diffus cosmologique (CMB) mesuré par le satellite Planck nous montre un univers parfaitement ennuyeux : le modèle ΛCDM cosmologique le plus ordinaire, aucune trace de nouvelles particules de faible masse au-delà du modèle standard, aucun indice d'une masse des neutrinos plus grande que prévu ... etc. Toutefois au niveau quantitatif les choses sont un peu plus intéressantes car Planck a considérablement rétréci l'espace des paramètres des modèles inflationnaires.
... la situation actuelle est intéressante mais instable. Toutefois la limite r ≲ 0.11 peut ne pas être le dernier mot si la collaboration Planck parvient à exploiter ses données de polarisation. Les fluctuations tensorielles peuvent être mieux sondées via le mode B du spectre de polarisation CMB avec la sensibilité de Planck souvent annoncée autour de r ~ 0,05. En effet, si le paramètre ε n'est pas beaucoup plus petit que 0,01, comme le laisse entendre l'indice spectral, Planck est peut-être en mesure d'identifier le mode B et mesurer un ratio tenseur sur scalaire non nul. Ce serait une avancée majeure car nous pourrions ainsi connaître l'échelle absolue de l'inflation et obtenir un aperçu sur la physique fondamentale à 10^16 GeV ! N'observer aucun signal tout en fixant des limites plus fortes serait également intéressant car cela exclurait complètement les potentiels en loi de puissance. Nous verrons dans un an.
 Jester, Planck about Inflation, 20/04/2013
Post tapuscriptum du 17/09/13
Alan Guth, le père américain de la théorie de l'inflation cosmologique a été récompensé par le fameux prix de la Physique Fondamentale en 2012, prix créé et financé par le capital-risqueur milliardaire russe Yuri Milner lequel a parallèlement récompensé de nombreux travaux sur la théorie des cordes, la gravitation et l'informatique quantiques. Viatcheslav Mukhanov quant-à lui, le cosmologiste russe abondamment cité dans ce billet, est le cofondateur de la théorie de l'origine quantique des fluctuations cosmologiques primordiales (qui repose sur l'existence d'une phase d'accélération de l'expansion de l'univers), théorie dont on vient de voir que de nombreuses prédictions non triviales sont désormais validées sans ambiguité par les observations récentes du satellite Planck. L'avenir nous dira qui du comité du prix Nobel ou de celui du prix Milner sera le premier à récompenser ces importants travaux ...

//Remarque : traduction des extraits en français faite le 23/10/2013

mercredi 28 août 2013

Pourquoi les résultats sur la détection de matière noire sont-ils tellement contradictoires?

La guerre médiévale des détecteurs de Matière Noire
Ecoutons son récit par notre plus précieux "Fou de la Physique des particules", j'ai bien sûr nommé Jester et son drôle de blog Résonaances:
In theory, the algorithm for detecting dark matter is straightforward: 1) wait until a dark matter particle hits a nucleus in your detector hard enough to produce a visible recoil, 2) count the events and collect the Nobel prize, or set a limit on the dark matter scattering cross section on nucleons. The reality is more complex. Typical models of dark matter models predict the largest signal near the energy threshold of the detector where it is susceptible to all kinds of spooky background and noise. For this reason, the field of dark matter detection, with multiple contradictory claims and a good deal of bad blood, reminds of medieval England at the time of the Wars of the Roses. The latest claim of a dark matter signal from the CDMS experiment brings a new hope but also adds to the confusion... 
Théoriequement l'algorithme de détection de la matière noire est simple : 1) attendez qu'une particule de matière noire frappe dans votre détecteur un noyau  suffisamment fortement pour produire un recul visible, 2) comptez les événements et recevez le prix Nobel ou fixez une limite à la section efficace de diffusion de la matière noire par les nucléons. La réalité est plus complexe. Les modèles génériques de matière noire prédisent que le signal est le plus grand près du seuil en énergie du détecteur là où il est sensible à toutes sortes de bruits de fond malveillants. C'est pour cette raison que le domaine de la détection de matière noire, caractérisé par de multiples déclarations contradictoires et une bonne dose de ressentiments, rappelle l'Angleterre médiévale à l'époque de la guerre des Deux Roses. La dernière annonce d'un signal de matière noire par l'expérience CDMS apporte un nouvel espoir mais aussi ajoute aussi à la confusion ...


... what looks [above] like Pollock's painting is in fact a summary of best-fit signal regions and limits from various underground experiments in the dark matter mass vs. cross section parameter space. The most worrying aspect of the CDMS result is that the signal region seems comfortably excluded by the limits from Xenon-10 and Xenon-100 experiments (the green lines in the plot). To reconcile these results one must either assume a serious systematic issue with the xenon analyses, or consider more exotic dark matter models, for example the xenophobic ones where the effective coupling to xenon nuclei is suppressed. On the other hand, the region of the parameter space preferred by CDMS is consistent with the earlier detection claim by the germanium target detector CoGeNT. 
... ce qui ressemble [figure ci-dessus] à une peinture de Pollock est en fait un résumé - dans l'espace paramétré par la masse de la matière noire et sa section efficace de diffusion sur les nucléons - des zônes probables ou des limites estimées de détection telles que déterminées par diverses expériences souterraines. L'aspect le plus inquiétant du résultat de la collaboration CDMS est que la région du signal semble confortablement exclue par les limites des expériences xénon-10 et xénon-100 (les lignes vertes sur le graphique). Pour concilier ces résultats il faut soit envisager un sérieux problème d'erreur systématique avec les analyses de xénon ou envisager des modèles plus exotiques de matière noire, par exemple les modèles xénophobes où le couplage aux noyaux de xénon est supprimé. D'autre part la région de l'espace des paramètres préférée par CDMS est conforme à l'annonce antérieure de la détection par l'expérience Cogent basée sur une interaction avec des noyaux de germanium.
 Jester,  More mess with dark matter detection 16/04/2013

En attendant une hypothétique paix de Dieu, relisons les chroniques des erreurs passées
Le blogueur qui sévit ici et maintenant vient de proposer un petit commentaire au billet de Jester que voici :
On the theoretical side one can wonder if Dark matter detection is not harder than neutrino detection just because dark particles are a little bit less clearly founded than neutrinos were...
Then, on the experimental side, there could be something useful to learn for instance from the uplifting story of the appearance and disappearance of the 17 keV neutrinos...(http://phys.colorado.edu/sites/default/files/appearance_and_disappearance_of_the_17-kev_neutrino.pdf) 
Sur le plan théorique, on peut se demander si la détection de matière noire n'est pas plus difficile que la détection des neutrinos simplement parce que les particules sombres ont des bases théoriques un peu moin solide que l'étaient celles des neutrinos ...  
Du coup sur le plan expérimental il y aurait peut-être quelque chose d'utile à apprendre par exemple de l'histoire édifiante de l'apparition et de la disparition des neutrinos à 17keV... http://phys.colorado.edu/sites/default/files/appearance_and_disappearance_of_the_17-kev_neutrino.pdf) 
laboussoleestmonpays, commentaire déposé et accepté le 27/08/2013

//traduction des extraits en anglais effectuée le 23/10/13

mardi 27 août 2013

"I have a dream" / Pourquoi croire à une symétrie déjà vraie (mathématiquement cohérente) qui n'est pas encore réelle (physiquement manifeste)?

Un quantum d'obstination (dernier billet de cette rubrique)

(Groupe de) Supersymétrie : de (forcément) pas fausse à (probablement) vrai?
Supersymmetry was (and is) a beautiful mathematical idea. It extends the symmetry of special relativity. Special relativity postulates the invariance of physical law under motion with a constantvelocity. It thereby allows us to transform between objects with different speeds and to predict the properties of moving particles from those of stationary ones. Supersymmetry postulates the invariance of physical law under certain kinds of motion in a quantum-mechanical extension of space-time, superspace. Superspace has four extra quantum-mechanical dimensions, quite different from the familiar four dimensions of space and time. When a particle “moves” in the extra quantum dimensions it just acquires a tiny amount of angular momentum, or spin. So you wouldn’t want to live in the new suburbs of superspace: it’s very cramped, and makes you dizzy. But the mathematics of supersymmetry promised (and still promises) to help us unify fundamental physics...  
The problem with applying supersymmetry is that it’s too good for this world. We simply don’t find particles of the sort it predicts. We don’t, for example, see particles with the same charge and mass as electrons, but a different amount of spin. 
Symmetry principles that might help to unify fundamental physics are hard to come by, however, so theoretical physicists won’t give up on them easily. Based on previous experience with other forms of symmetry, we’ve developed a fallback strategy, called spontaneous symmetry breaking. In this approach we postulate that the fundamental equations of physics have the symmetry, but the stable solutions of these equations do not... 
While straight supersymmetry is a (wrong) statement about the properties of the world, spontaneously broken supersymmetry is a research program. For it is a statement about equations that describe the world, and only indirectly about the world itself. Carrying forward this research program involves model building – the creative activity of proposing candidate equations and analyzing their consequences... 
Building models with spontaneously broken supersymmetry that are consistent with everything else we know about physics is a difficult business. Even if you manage to get the symmetry to break, the extra particles are still there (just heavier) and cause various mischief...  
To get oriented and make a definite  calculation, we started by doing the crudest thing, that is to ignore the whole problem of breaking supersymmetry, which allowed us to use very simple (but manifestly unrealistic) models. 
The result was amazing, at least to me. The supersymmetric versions of the gauge symmetry models, although they were vastly different from the originals, gave very nearly the same answer for the couplings.  
That was the turning point. We put aside the “not wrong” complicated models with spontaneous supersymmetry breaking, and wrote a short paper [5] that, taken literally (with unbroken supersymmetry), was wrong. But it presented a result that was so straightforward and successful that it made the idea of putting gauge symmetry and supersymmetry unification together seem (maybe) right. We put off the problem of how supersymmetry gets broken. And while there are some good ideas about it, there is still no generally accepted solution... 
We all eagerly await operation of the Large Hadron Collider (LHC) at CERN, where, if these ideas are correct, the new particles of supersymmetry – or, you might say, the new dimensions of superspace – must make their appearance... 
This little episode, it seems to me, is 179 degrees or so out of phase from Popper’s idea that we make progress by falsifying theories. Rather in many cases, including some of the most important, we suddenly decide our theories might be true, by realizing that we should strategically ignore glaring problems. It was a similar turning point when David Gross and I decided to propose QCD based on asymptotic freedom, putting off the problem of quark confinement. But that’s another story ...
F. Wilczek, From "Not Wrong" to (Maybe) Right 24/03/2004

Grande symétrie (algébrique non commutative) : de (nécessairement) valide à (peut-être) réelle?
La lecture de ce texte du célèbre physicien Wilczek, belle défense épistémologique de la supersymétrie, par un des pères de la théorie moderne des interactions fortes, a fini de me convaincre qu'il fallait par ailleurs défendre l'application des idées de la géométrie non commutative en physique des particules car les outils et les idées qu'elle apporte commencent à montrer leur utilité. Cette tâche spécifique cadrant mal avec la ligne éditoriale tracée initialement pour ce blog, lequel vise à comparer des développements scientifiques entre eux mais pas à défendre systématiquement un cadre théorique donné, le blogueur décide aujourd'hui de mettre fin à la rubrique un quantum d'obstination en la promouvant au rang de blog autonome intitulé : quantumostinato.

Du rêve à la réalité
Hommage en passant à un homme dont le grand rêve d'hier sera célébré demain et dont la fin tragique n'a pas empêché que son rêve se transforme pas à pas en réalité aujourd'hui grâce aux hommes de bonne volonté.

dimanche 25 août 2013

(Les toilettes et le plombier ou) le roi shakespearien et le mendiant (aux poches remplies de diamants)

Bossons sur le boson (4)

Voici trois façons de voir le boson (et le mécanisme) de Higgs dans le Modèle Standard...

Celle de Sheldon Glashow, physicien théoricien se languissant de résultats expérimentaux inattendus en physique des particules :
Sheldon Glashow, winner of the 1979 Nobel Prize in Physics, once called the Higgs the "toilet" of the standard model of particle physics. [Michael] Turner [a cosmologist at the University of Chicago] explained that Glashow coined the term because the Higgs performs an essential function: Keeping the standard model functioning, at least in an intellectual way... "Really, the Higgs is more like a plumber with duct tape, holding the standard model together," Turner said. "A lot of the inelegance of it's all wrapped up in the Higgs." And rightly so, he noted, because it's required to make the other forces involving mass—such as gravity—make sense. "At the same time, the Higgs can be frustrating because it doesn't shed much light on gravity," Turner said, assuming that the particle is eventually discovered.  
Sheldon Glashow, lauréat du prix Nobel de physique 1979, désigna à une occasion le boson de Higgs de «toilettes» du modèle standard de la physique des particules. [Michael] Turner [un cosmologiste à l'Université de Chicago] a expliqué que Glashow a inventé le terme parce que le Higgs remplit essentiellement une fonction : assurer le bon fonctionnement du modèle standard, au moins d'une manière intellectuelle ... "En fait, le boson de Higgs ressemble davantage à un plombier qui assure l'étanchéité du modèle standard avec du ruban adhésif" a expliqué M. Turner. "Une grande partie de l'inélégance de l'ensemble est emballée dans le Higgs". Et à juste titre, note-t-il, car il est nécessaire à la cohérence de la description des autres forces impliquant la masse comme la gravitation. "Dans le même temps, le mécanisme de Higgs peut être frustrant car il ne jette pas beaucoup de lumière sur la gravité» a déclaré Turner, à supposer que la particule soit finalement découverte.
Dave Mosher, Greatest mysteries: what causes gravity? 10/08/2007;

Celle de David Kastler, physicien théoricien fervent partisan de l'analyse mathématique conceptuelle de la théorie quantique des champs :
Carried  by enthusiasm, I once mythologized the standard model as a Shakespearean king disguised as a beggar (no mediocre role). 
Porté par l'enthousiasme, il m'est arrivé une fois de mythifier le modèle standard comme un roi shakespearien déguisé en mendiant (ce qui n'est pas un rôle médiocre).
 D. Kastler, Noncommutative geometry and fundamental physical interactions: The Lagrangian level, 06/2000;

Celle d'Alain Connes, mathématicien simplement amoureux de physique, commentant le point de vue précédent :
I hope the beggar has diamonds in its pockets. 
J'espère que le mendiant a des diamants dans les poches.
A. Connes, On the fine structure of spacetime.  

Deux petites remarques en passant ...
Premièrement le caractère prosaïque de la comparaison imaginée par Glashow en dit en fait peut-être autant sur son estime pour un autre physicien à l'origine de l'utilisation du boson de Higgs dans le Modèle Standard que sur son opinion sur le dit boson, du moins si l'on en croit Peter Woit :
Glashow and Weinberg were famous for not getting along, with Glashow referring to the Higgs mechanism in the Weinberg-Salam model as “Weinberg’s toilet”. 
Glashow et Weinberg étaient célèbres pour ne pas s'entendre, Glashow faisant référence au mécanisme de Higgs dans le modèle de Weinberg-Salam comme "les toilettes de Weinberg".
P. Woit, commentaire au billet Nobel Prize Announced, 04/10/2005 

Deuxièmement, concernant le mendiant aux poches pleines de diamants signalons ce commentaire qui figure sur la page de résumé d'un article de Connes sur le site de prépublication arxiv :
Conceptual Explanation for the Algebra in the Noncommutative Approach to the Standard Model
Ali H. Chamseddine, Alain Connes
(Submitted on 25 Jun 2007 (v1), last revised 21 Nov 2007 (this version, v3))         Comments:Title change only. The title "A Dress for SM the Beggar" was changed by the Editor of Physical Review Letters. 
Commentaire : seul le titre de l'article a changé. "Un manteau pour le modèle standard ce mendiant" a été modifié par la rédaction de Physical Review Letter.
 //traduction des textes effectuées le 14/12/13.

samedi 24 août 2013

Questionner le présent en croisant une histoire passée déjà racontée avec une destinée future seulement espérée

Entre physiciens théoriciens conjecturant des théories des cordes radieuses et physiciens mathématiciens extrapolant le quantique par la tangente noncommutative
Voici ce que le blogueur pourrait penser de l'état actuel de la recherche en physique des hautes énergies à travers ses lectures: 
Maintenant commence une période de doute pour les théories au delà du modèle standard. La communauté des théoriciens pourrait bien se scinder en deux groupes que l'on appellera, par analogie avec les fonctions d'onde atomiques, les physiciens radiaux et azimutaux. Les physiciens radiaux seraient préoccupés  par la dynamique à l'échelle de Planck, en particulier la quantification de l'interaction gravitationnelle. Ils auraient peu à dire sur le mécanisme de Higgs de la brisure électrofaible. Certains d'entre eux se baseraient essentiellement sur une savante machinerie mathématique, exploitant des outils de la géométrie différentielle, de la topologie algébrique ...etc, utilisant des principes conjecturaux de supersymétrie, de dualités entre théories de jauge et gravité, élaborant des théories des supercordes avec des dimensions compactifiées difficilement connectables à la phénoménologie du Modèle Standard. La vérification du raccordement exact à l'échelle électrofaible se ferait plus tard... Les physiciens azimutaux seraient plus modestes. Ils auraient pris comme règle de travail qu'il y a peu d'espoir d'appréhender dès maintenant le principe d'unification de la gravitation et de la théorie quantique des champs. A la place ils se seraient attachés à mieux comprendre le mécanisme de brisure de symétrie électrofaible en construisant pour le boson de Higgs un formalisme quantique et géométrique inspiré à la fois du principe d'équivalence d'Einstein et des théories des jauges renormalisables de Yang-Mills. 
Ce texte est une réflexion personnelle (sur le modèle spectral presque commutatif déjà maintes fois discutés sur ce blog) librement inspirée de cet extrait d'un formidable exposé de Steven Weinberg, le plus éclairant qu'il m'ait été donné de lire sur la construction du Modèle Standard :
There began a period of disillusionment with quantum field theory. The community of theoretical physicists tended to split into what at the time were sometimes called, by analogy with atomic wave functions, radial and azimuthal physicists. Radial physicists were concerned with dynamics, particularly the dynamics of the strong interactions. They had little to say about the weak interactions. Some of them tried to proceed just on the basis of general principles, using dispersion relations and Regge pole expansions, and they hoped ultimately for a pure S-matrix theory of the strong interactions, completely divorced from quantum field theory. Weak interactions would somehow take care of themselves later. Azimuthal physicists were more modest. They took it as a working rule that there was no point in trying to understand strong interaction dynamics, and instead they studied the one sort of thing that could be used to make predictions without such understanding - principles of symmetry.
Steven Weinberg, The making of the Standard Model  16/09/2003

Remarque: 
Le titre de ce billet est un clin d'oeil, en passant, au formalisme quantique rétrodictif développé par Yakir Aharonov et ses collaborateurs. Ce formalisme propose une vision duale du temps qui approfondit la compréhension de la nature complexe du processus de mesure quantique et ouvre sur de passionnants et prometteurs développements expérimentaux ...

Ajout du 27/08/2013
Sûrphysiciens versus épiphysiciens?
Sans vouloir relancer de vaines guerres pycrocholines autour de la théorie des cordes mais dans le but d'interroger plus précisément la communauté des physiciens des particules sur la prégnance des idées supersymétriques on pourrait à titre facétieux remplacer le terme physiciens radiaux par sûrphysiciens et celui de physiciens azimutaux par épiphysiciens... 

//correction homéopatique du 07/01/14 : le mot périphysicien est remplacé par le mot épiphysicien.

vendredi 23 août 2013

Le pari (déjà?) à moitié gagné de Sheldon Lee Glashow

 Sans commentaire // ou presque (17)
I would predict that the LHC will make astonishing discoveries which do not confirm the theories of anybody in this room. 
Je prédirais volontiers que le LHC fera des découvertes surprenantes qui ne confirmeront aucune des théories attachées aux personnes présentes dans cette salle.
Sheldon Lee Glashow, Panel discussion on the future of particle physics, Conference "1973 : Neutral Currents, 1983: W+-&Z° Bosons. The anniversary of CERN's discoveries and a look into the future 19/09/2003

... to discover the Higgs particle at a mass-energy of 125 GeV, and no other new particles or phenomena below, say, 1000-2000 GeV or so, would fly in the face of what we’ve seen again and again in physics, both in past data and in calculations within speculative theories. In this sense, finding nothing except a Standard Model Higgs at the LHC would be shocking. (I say “would be” rather than “is” because the LHC is still young, and no overarching conclusions can yet be drawn from its current data.)... 
... découvrir le boson de Higgs à une masse-énergie de 125 GeV sans aucune autre particule ou phénomène nouveau en dessous de, disons 1000 à 2000 GeV ou plus, serait aller à l'encontre de ce que nous avons vu de manière répétée en physique, à la fois dans les mesures passées et les calculs issus des spéculations théoriques. En ce sens, ne trouver rien d'autre qu'un Higgs du Modèle standard au LHC serait choquant. (Je dis «serait» plutôt que «est» parce que le LHC est encore jeune, et aucune conclusion générale ne peut encore être tirée de ses données actuelles).
M. Strassler,  SEARCH day 1 21/08/2013

// Dans la mesure où le premier round d'expériences menée au CERN avec le LHC à une énergie de 8 TeV= 8000 GeV n'a pas conduit à la découverte d'autres particules nouvelles que le boson scalaire de Higgs à 125 GeV on peut se demander si Glashow un des pères du Modèle Standard n'avait pas vu juste ...

//traduction des textes effectuée le 14/12/13

mercredi 21 août 2013

De quelles particules le(s) boson(s) scalaire(s) contrôle(nt) les masses ?

Bossons sur le boson (3) ...

... ou jouons un peu avec (deux ou) trois bosons scalaires (prédits par le modèle spectral noncommutatif...)

A notre échelle (électrofaible) le boson de Higgs contrôle les masses des particules du Modèle Standard 
As the Higgs boson propagates in the quantum vacuum, it feels the presence of virtual particles and interacts with them. A characteristic property of the Higgs boson is to interact with any Standard Model particle with a strength proportional to the corresponding particle mass. Indeed, as Lenin once explained, “The Higgs mechanism is just a reincarnation of the Communist Party : it controls the masses” [ V.I. Ulyanov (better known as Lenin), apocryphal. I learned this quote from Luis Alvarez-Gaum]
Gian Francesco GIUDICE NATURALLY SPEAKING: The Naturalness Criterion and Physics at the LHC 30/03/2008

Mais qui contrôle le boson de Higgs ou dit autrement quel est le mécanisme à l'origine de la brisure de la symétrie électrofaible celui-là même qui donne une valeur moyenne sur le vide non nulle au champ de Higgs?


Dans de plus hautes sphères (échelle d'énergie où la symétrie droite-gauche n'est pas brisée?) un grand frère, le Big Broson, pourrait bien piloter le (mécanisme de) Higgs 
The prediction of the mass of the Higgs in the vicinity of 126 GeV however depends on the presence of a scalar field, called σ, which was introduced in [an almost commutative spectral model by Chamseddine and Connes]... One of the results of [our] paper is to show that the σ field is [...] coming from a connection one form [...] of larger symmetry and is the one breaking a left-right symmetry... We point out there is a “next level” in noncommutative geometry, but that it is intertwined with the Riemannian and spin structure of spacetime, and therefore it naturally appears at a high scale... We show how the breaking of this grand symmetry to the standard model amounts to make the spin structure of spacetime emerge from a pre-geometric phase... This means that the grand [symmetry is associated with] a phase of the universe in which the spin and rotation structure of spacetime has not yet emerged.
Agostino Devastato, Fedele Lizzi, Pierre Martinetti, Grand Symmetry, Spectral Action, and the Higgs mass 9/08/13

Mais au plus haut des Cieux - là où toute hiérarchie (échelle de masses) est abolie - n'y aurait-il pas un chef d'orchestre de l'harmonie des sphères, un ultime boson scalaire : le Dilaton?  

à suivre...